Cultiver une force tranquille

05/04/2023

En tant que fan de Star Wars, j'ai toujours apprécié la ligne de conduite des chevaliers Jedi, qui pour la plupart font preuve de calme et d'objectivité malgré leur stature et leur puissance. Quand ils le peuvent, ils règlent leurs problèmes avec diplomatie, en désamorçant les conflits, en trouvant des compromis, ne sortant leur sabre qu'en dernier recours.

C'est selon moi l'un des nombreux parallèles visibles entre l'univers de Star Wars et les arts martiaux, représentant une vision idéalisée du Maître, ayant atteint une telle maîtrise de lui-même que la "Force" de caractère qu'il a obtenue lui permet de maîtriser ses émotions lorsque celles-ci tentent de le submerger.

Bien entendu, ne pas chercher le conflit physique ne doit pas se traduire par un comportement de victime, où l'on se laisse malmener, même verbalement. Cela ne signifie pas non plus que le sabre ne doit jamais sortir de son fourreau, autrement il n'est d'aucune utilité.

Mais d'une part, plus un pratiquant évolue dans la voie des arts martiaux, plus il développe des capacités physiques et techniques. Si l'entraînement est sincère, l'efficacité au combat viendra naturellement. Ainsi, plus nous pratiquons, plus nous sommes à même de prendre conscience de la dangerosité de certaines techniques. Un pratiquant calme et sain d'esprit ayant pris conscience du danger auquel il s'expose, et auquel il expose son adversaire potentiel, évitera toujours d'en arriver au conflit physique afin d'éviter un scénario dramatique.

De plus, une personne ayant pratiqué du sparring avec différents partenaires, de différents niveaux, sait pertinemment à quel point une frappe "mal" placée peut surgir rapidement, même par hasard, même venant d'un débutant. Quand on sait que l'issue peut être tragique, et que l'on arrive à faire preuve de maîtrise de soi pour prendre du recul et garder son calme, on préfèrera naturellement la solution pacifique.

D'autre part, cette maîtrise de soi dont je viens de faire mention n'est pas innée chez tout le monde, une personne ayant un tempérament de feu pourrait agir même en connaissant les issues éventuelles, par manque de prise de recul. Enseigner les arts martiaux à ce type de profil sans enseigner l'étiquette qui accompagne la discipline pratiquée, c'est allumer un feu qui a de grandes chances de se transformer en incendie.

Se battre à la moindre occasion, à la moindre provocation, sans réfléchir aux conséquences, c'est être fort physiquement mais faible mentalement.

Les arts martiaux nous font profiter d'un cadre propice à un enseignement global, permettant d'être fort physiquement et mentalement, de devenir une meilleure personne, de contribuer à l'amélioration de la société. Nous apprenons les codes, le respect de soi et des autres, l'écoute, l'observation. Nous cultivons notre humilité, en cherchant constamment à avancer sur un chemin qui ne finira jamais. À force de travail, nous apprenons que nous avons des limites, des faiblesses, et nous les acceptons, car sans cela nous ne pouvons plus progresser.

Quand on atteint ce seuil, où l'on s'accepte, nous n'avons plus rien à prouver. On réalise que physiquement, nous sommes très forts par rapport à certains, mais très faibles par rapport à d'autres, que ce sera toujours ainsi, l'âge n'aidant pas. Sous cet aspect, la culture de l'égo est inutile, voire nocive.

Quand nous n'avons plus rien à prouver, nous sommes moins enclins à nous emporter pour de simples provocations, ou quelques insultes. Nous réalisons qu'en réalité, ne pas réagir avec excès demande plus de force qu'une frappe bien placée.

Tous les pratiquants connaissent la symbolique du Yin/Yang, mais peu l'appliquent et la cultivent. Je pense qu'il est intéressant d'évoluer en gardant cette idée à l'esprit. Quand nous pratiquons les arts martiaux externes, nous développons le Yang, mais essayons de ne pas oublier le Yin.